Linéarité ou Cycles en éducation? Compétition ou coopération?

Publié le 23 Septembre 2013

Passé inaperçu, ou presque dans le courant de l'été, il y a pourtant eu le décret instituant le conseil pédagogique école/ collège et la nouvelle organisation des cycles.

Désormais, les cycles sont les suivants:

Cycle1, des apprentissages premiers: les classes maternelles

Cycle 2, des apprentissages premiers: CP/CE1 et CE2

Cycle 3, de consolidation : CM1/CM2 et 6ème

Cycle 4, des approfondissements : 5ème/ 4ème et 3ème.

La mise en œuvre de ces décrets est cependant très prudente : le conseil pédagogique se mettra en place progressivement au cours de l'année 2014/2015 et le cycle 1 est mis en œuvre à cette rentrée ; les autres suivront dans les années à venir. Les décisions politiques marchent à pas lents quand certaines réformes, comme celles- là pourraient se décliner bien plus simplement. Pourquoi donc cette réserve? Pourquoi donc ce silence sur ces points?

S'agirait-il d'un levier de transformation apparemment anodin? La communication sur les rythmes scolaires aurait-elle pris toute la place médiatique et politique?

Voici quelques-unes de mes réflexions sur le sujet:

Depuis 1989, les cycles organisent l'école. La loi de 2005 ne les avait pas abrogés; en fait elle n'en a pas eu besoin car à de rares exceptions, les équipes enseignantes n'abandonnent pas l'idée de classe et du tempo de l'année scolaire. Pourquoi donc une telle résistance? Alors que le simple bon sens nous fait bien comprendre que cette organisation linéaire en classe d'âge peut comporter des effets négatifs pour certains enfants et créer une pression angoissante aussi bien pour les enseignants que pour les parents. Prenons l'exemple de la classe de CP et de l'apprentissage de la lecture! Comment secréter une telle peur et produire les conséquences connues sur la scolarité lorsque tel enfant se trouve en difficulté et ne sait pas lire au mois de janvier ? Avons-nous déjà vu tous les enfants marcher à 12 mois précisément tels des robots programmés? Il s'agirait bien de concevoir que des enfants peuvent apprendre à lire à 5 ans alors que d'autres seront à l'aise vers l’âge de 7ans ... Cette pression exercée conduit à un échec scolaire ou à une médicalisation qui ne se justifie pas dans tous les cas. Il est normal qu'un enfant lorsqu'il apprend à tracer lettres et chiffres passe par une phase d'inversion des signes, sans qu'il y ait lieu de s'alarmer. Il est justement en train d'apprendre! Sans modifier radicalement l'organisation de l'école, acceptons que les enfants d'un même cycle disposent de 3 ans pour réaliser les apprentissages visés. Cela veut dire qu'un enfant de CP qui ne sait pas encore lire poursuivra son apprentissage en CE1. Cela suppose une différenciation pédagogique effective dans la conception et la mise en œuvre des situations d'enseignement/apprentissage tout en évitant les dérives de l'individualisation marginalisante ou l'indifférenciation globalisante. Voir un seul groupe auquel est proposé le même menu, ou voir des sujets avec des besoins différents mais capables d'interagir et de tirer profit d'aides réciproques devant une situation riche et plurielle témoigne d’une vision de l’école et du métier différente. Dans cette approche par cycles, c'est une autre organisation de la classe qui donne des effets positifs mais qui demande aussi une explicitation auprès des enfants et des parents. Il est question ici de développer un "collectif" apprenants dont la règle principale est de ne laisser personne de côté. Privilégier la coopération plutôt que la compétition? En fait il s'agit de savoir si nous voulons vraiment une école solidaire et favorisante le développement des compétences de chacun. Finalement, c'est à se demander si en chacun de nous ne demeure pas la tentation secrète "d'écraser" les autres et de maintenir ainsi un système de linéarité: même point de départ, même programme, même crédit de temps et sélection sur la ligne d'arrivée!

Autre proposition: atténuer la notion de classe d’âge, construire des organisations d'école beaucoup plus modulaires et flexibles. Un enfant de 5 ans qui sait lire n'est pas pour autant forcément prêt à "ingurgiter" un programme de CE1, il peut sans doute le faire, certes; mais il pourrait profiter de moments de jeux coopératifs, d'entrainements graphiques et de motricité tout en suivant des modules dans lesquels sa capacité à lire serait mobilisée et développée. On le voit, la classe de cycle (imaginons dans le nouveau schéma CP, CE1, CE2) peut se décliner de multiples façons et ouvre d'autres possibilités. Cela nécessite une volonté commune des enseignants et de la communauté éducative. Des expériences existent mais elles semblent rester à la marge et ne pas encore contaminer l’ensemble du système.

Le conseil école/ collège et le cycle 3 réunissant les classes de CM1, CM2 et 6eme apportent un vrai changement à condition que ce nouveau cycle permette vraiment aux élèves de consolider les compétences essentielles aux apprentissages ultérieurs. Cela nécessite une vraie collaboration des enseignants d’école et de collège. Celle-ci est déjà visible par endroits autour par exemple des PPRE passerelles.

Une vraie « refondation » de l’école ne devait-elle pas réaffirmer ces principes forts? Les décrets parus cet été semblent bien timides, ou alors malheureusement réalistes face à nos inerties individuelles et systémiques, à nos peurs de changer, à une non vision de l’urgence de la non exclusion scolaire.

Rédigé par poutouxvero.over-blog.com

Publié dans #Atout Actualités

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